Yasu Kakegawa, la passion du travail artisanal

Après Florent Weugue, premier français diplômé de l’Association des Instructeurs en Thé Japonais (Nihoncha Instructor Association), le second invité de notre blog est Monsieur Yasuharu Kakegawa, un fin connaisseur qui s’est donné pour mission de faire découvrir plus largement au public français les subtilités du thé de son pays natal et, à travers ce produit, de se faire le promoteur d’un travail artisanal qu’il faut soutenir et préserver.
C’est dans sa petite boutique nichée dans l’étroite rue Simon le Franc, juste derrière le centre Pompidou à Paris, que j’ai rencontré M. Kakegawa, lequel réserve un accueil extrêmement chaleureux à tous ses visiteurs. Je lui ai posé pour vous quelques questions.

Valérie Douniaux : Qu’est-ce qui vous a motivé à ouvrir maintenant une boutique de thés du Japon à Paris ?
Yasu Kakegawa : Ces dernières années les thés japonais sont devenus des produits assez faciles à trouver en France. Mais, comme dans bien d’autres domaines, comme pour le pain, les fruits ou les légumes, malgré une offre plus grande, la qualité n’est pas toujours de mise. Il devient malheureusement difficile de trouver un aliment qui a un arôme, un goût authentiques ! J’ai donc voulu présenter des thés de qualité produits par des artisans passionnés ; des thés qui ne sont pas seulement délicieux mais aussi porteurs d’émotions.
V. D. : Comment définiriez-vous un excellent thé ?
Y. K. : C’est un chef-œuvre d’harmonie créé par les efforts du planteur et la nature. Il faut les deux. S’il y a que l’un des deux éléments, on ne peut pas parvenir à l’excellence.
V. D. : Peut-on faire vieillir les thés japonais comme le vin ?
Y. K. : Oui, bien sûr. Aujourd’hui les gens pensent souvent qu’il faut consommer le thé tout de suite après la récolte de printemps et que l’arôme et le goût se perdent avec le temps. Ce n’est pas tout à fait vrai, l’arôme et le goût évoluent. Autrefois on ne consommait pas le thé juste après la récolte, on attendait au moins l’arrivée de l’automne. Nous avons gardé une trace de cette coutume dans la cérémonie du kuchi-kiri, liée au chanoyu, et pendant laquelle, à l’automne, on ouvre la jarre à thé scellée après la récolte de printemps.
Un peu comme les vins de qualité bonifient avec le temps, les bons thés vieillissent bien. Imaginez un Bordeaux rouge cru classé tannique. On peut le consommer à n’importe quel moment, mais en attendant un peu, on apprécie encore plus sa dégustation : le tanin s’arrondit, le bouquet évolue ; l’arôme devient plus complexe, et le goût plus équilibré…
C’est valable pour le thé japonais de qualité. Je vous encourage à expérimenter par vous-même. Achetez plusieurs paquets d’un même thé au moment de l’arrivée de la nouvelle récolte (vers mai, juin). Ouvrez un paquet tout de suite. Puis un autre en septembre. Ensuite un autre en décembre…etc.
V. D. : Quels sont les thés que vous préférez ?
Y. K. : Plutôt que des blends (mélanges), j’aime des produits qui ont leurs propres caractéristiques, qui font sentir le terroir et le planteur qui les a créés. Ainsi, chacun de mes thés correspond à un planteur, à un cultivar particulier. Cette façon de présenter les thés japonais est non seulement rare en Occident, mais aussi au Japon ! Et il arrive donc souvent que des touristes japonais passent dans ma boutique pour ramener avec eux du thé au Japon !
V. D. : Un message en conclusion ?
Y. K. : Je voudrais remercier mes clients, et en même temps exprimer ma reconnaissance à l’égard de mes producteurs. Il est difficile de produire des thés de qualité. Il s’agit d’un an de travail constant, mais le résultat, c’est une production très limitée au printemps. Il arrive qu’une condition climatique défavorable détruise ce fruit d’une année d’efforts soutenus. Sans ces artisans passionnés, ma boutique ne pourrait pas exister.

Le site de Yasu Kakegawa : yasukakegawa.com

Thés du Japon – Yasu Kakegawa
12 rue Simon Le Franc 75004 Paris
Tél : 01 44 61 28 21
Ouvert de 13h à 18h30 sauf le mardi et le mercredi